Bernoulli, Johann I an Scheuchzer, Johannes (1720.07.10)

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Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Scheuchzer, Johannes, 1684-1738
Ort Basel
Datum 1720.07.10
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur ZB Zürich. SIGN: Ms H 321a, Nr. 91 pp. 281-284
Fussnote Adresse und Siegel



File icon.gif Monsieur et tres-honoré Ami

On m'a rendu Vôtre derniere du 23 du passé[1] avec l'argent pour les deux livres que je Vous avois envoyés; j'ai trouvé en effet qu'il y avoit 8 deniers de trop, je Vous en remercie au nom du mendiant au quel je les ai donnés immediatement aprez avoir reçû Votre Lettre. Je dois Vous accuser aussi la reception du paquet des Livres venus d'Italie pour nous; Mais il faut que je Vous gronde sur un fait qui est contre la regle d'une raisonnable civilité, c'est que Vous aviez franchi ce paquet jusques-ici, au lieu de nous demander des fraix que Vous aurez peutetre deboursés pour le port jusqu'à Zuric; cela ne s'appelle-t-il pas prodiguer son bien pour un autre sans necessité, et pousser la civilité par dessus les justes bornes? la bienseance exige que nous Vous remboursions tout cela et que nous Vous remerciions encor de Votre peine, c'est pourquoi je Vous prie de nous dire combien nous Vous devons, si Vous ne le dites pas, je ne Vous en aurois point d'obligation, et d'autant moins que j'ai eu la moindre part dans ces livres, la plus grande partie ayant été pour Mr. Stehelin ou plutot pour Mr. le D.r Saltzman à Strasbourg, pour le quel il les avoit achetés; ainsi donc qu'avez Vous besoin d'étre liberal envers un homme qui Vous est peutetre inconnu?

Il faut que je Vous avoue, que je regardois comme une affaire faite Vôtre avancement à la Profession File icon.gif de l'Histoire de la Patrie en recompense de Vos travaux et services rendus gratuitement à la Bibliotheque, car je comtois que la promesse qu'on Vous fit seroit executée avec plus de ponctualité, qu'on n'a la coutume ici de faire à l'egard des gens qui servent le public: cependant il faut se flatter, que la parole qu'on Vous a donnée que Vos Seigneurs Vous considereront Eux memes au bout de quelques années si dans ce temps il ne se trouve point d'autre issue, sera enfin observée plus religieusement, et partant prenez encor patience pour une couple d'années.

Ce que Vous m'avez comté de la plaisante maniere de censurer l'ouvrage sur Job[2] m'a preté à rire: de grace, qui est ce qui auroit crû qu'on deviendroit Heretique en disant que Dieu est par tout présent? N'est ce pas que tout le monde le dit, exceptés peutetre les Sauvages des Indes, Vos censeurs doivent avoir une étrange idée de Dieu pour le concevoir comme incarceré dans un lieu: Ils disent, qu'il est dans le Ciel, parce que le Notre Pere le dit; soit! mais tout l'univers n'est autre chose que Ciel, et notre Terre y est comme un autre Astre, par consequent Dieu étant dans le Ciel est dans tout l'univers selon sa vertu et son efficace. Les Theologiens de Groningue me firent autrefois une querelle tout à fait opposée[3] sur ce qu'il m'echappa de dire que Dieu n'est nulle part (Deum esse nusquam) Vous m'entendez bien que je prenois localement le terme de nusquam, pour donner à connoitre que Dieu étant Esprit ne peut pas remplir un lieu ou un espace selon les trois dimensions à la maniere des corps; j'avois beau dire que je ne niois pas sa toute presence selons ses operations, il me falloit passer File icon.gif pour un Heretique et meme pour un Athée, car mes Adversaires ont eu assez d'impudence pour m'imputer que j'avois nié l'Existence de Dieu: il ne me servoit de rien de leur repondre, que cette consequence Deus est nusquam Ergo, Deus non est qu'ils tiroient de ma these, étoit tres-fausse, et que c'étoit par pure calomnie qu'on me l'imputoit.

Notre Tour du Rhin est encore debout, on attend avec impatience qu'Elle ait la bonté de tomber en ruine d'Elle meme, parce que cela nous dispenseroit de la faire demolir, car cela couteroit; on aime mieux faire un bon usage de l'argent en le jettant dans le Rhin, ou en le faisant couler dans la bourse de certains particuliers qui ne valent pas le Diable.

Quant à ce que Vous me mandez touchant le passage dans Stumpfius,[4] je ne puis Vous encore rien dire, parce que Mr. Iselin quoique de retour des eaux de Plombiere, repartit deux jours aprez à la campagne pour s'y delasser et rafraichir un peu; mais je Lui en parlerai quand il sera revenu, et je le ferai en meme temps ressouvenir du Catalogue que Vous desirez de nos manuscripts Historiens.[5]

Ma femme et le reste des miens qui sont ici, Vous saluent tres officieusement. Et moi je finirai plutot mes jours que l'ardeur avec la quelle je suis Monsieur Votre treshumble et tresobeissant serviteur J. Bernoulli

Bâle ce 10. Juillet 1720.

File icon.gif A Monsieur

Monsieur Jean Scheuchzer

tres-Celebre Docteur en Medecine

de l'Academie Imperiale des Cu-

rieux de la Nature etc.

à Zuric


Fussnoten

  1. Johannes Scheuchzer an Johann I Bernoulli von 1720.06.23.
  2. Scheuchzer, Johann Jakob, Jobi physica sacra, oder Hiobs Natur-Wissenschafft, vergliechen mit der Heutigen ..., Zürich (H. Bodmer) 1721.
  3. Zum Streit Johann I Bernoullis mit den Groninger Theologen siehe die Anmerkung in seinem Brief an Johann Jakob Scheuchzer von 1710.11.19.
  4. Siehe dazu die Anmerkungen im Brief von Johannes Scheuchzer an Johann I Bernoulli von 1720.04.14.
  5. Johann I Bernoulli sandte eine Abschrift aus dem handschriftlichen Universitätskatalog mit seinem Brief von 1720.07.24. Dort finden sich nähere Angaben zu diesem Dokument.


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