Scheuchzer, Johannes an Bernoulli, Johann I (1720.12.08)
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Autor | Scheuchzer, Johannes, 1684-1738 |
Empfänger | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Ort | Zürich |
Datum | 1720.12.08 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 668, Nr. 130* |
Fussnote |
J'ay l'honneur de repondre à Vôtre treschere du 4.e de ce Mois.[1] Et je suis même en train de vous dire des choses si etranges, que j'ay peur, que vous me disiés tout haut, que je suis une espece de Protée, ou Protée même nouvellement resuscité. J'ay pris de nouveau la resolution inopinée à moy même et fort nouvelle, j'ose même dire fort surprenante et mysterieuse aux autres, de continüer mon Bibliothecariat.[2] J'ay changé en même temps ma premiere forme, et j'en ay pris une autre, si bien que je suis metamorphosé en tout. De Medecin que j'êtois malgré moy, je suis devenu tout d'un coup membre de la Chancellerie, m'êtant proposé en même temps de briguer doresnavant toutes les charges, qui en dependent; le motif, qui m'y a poussé êtoit à ce qui me semble fort naturel, je vous laisse juger vous même, si ma pensée êtoit juste ou non. Je disois à moy même, quand un homme, qui de toute sa vie n'a fait autre chose, que faire attention aux affaires de la Chancellerie, et même celle de la Chambre des Comptes, se croit capable de se transformer en Professeur, ne seroit il pas possible, qu'un homme de Lettres se puisse metamorphoser en Secretaire, ou quelque autre animal de la même espece? Et lorsque j'avois calculé et recalculé, j'ay trouvé, non seulement qu'oüi, mais que cette metamorphose êtoit encore plus facile que la premiere. Aussy touts mes Amis ne trouverent rien d'extraordinaire ou d'illicite en cette Magie. Pour cet effet j'ay fait mon entrée dans la Chancellerie avanthier; Et hier j'ay declaré mes intentions au College de la Bibliotheque. Voila mon Cher Patron un drole d'accident. Souffrés de même, que je vous dise en detail son pourquoi. Nôtre nouveau Professeur de l'Histoire de la Patrie,[3] ayant eû les jours passés la bonté de parler fort favorablement de ma petite honnêteté (C'est ainsy, que le deffunt Chancellier de nôtre Republique,[4] s'appelloit soy même, faisant son compliment à un des Residents de Venise, lequel j'imite en cette occasion, pour vous convaincre en Geometre, c'est à dire demonstrativement, que je suis pour le moin aussy capable pour des Charges semblables, que luy) faisant esperance, que je pouvois un jour succeder à luy, si je voulois briguer pour luy la charge du Greffierat de Baden.[5] Je disois d'abord, que, puisque le Professeur même de la Politique, me croyoit en êtat d'obtenir pour luy des plus grandes faveurs, qu'il ne meritoit, j'employeray mon credit aupres le Grand Conseil, pour que j'obtienne cette charge pour moy même;[6] outre que, les raisons êtants tres fortes de mon côté, je ne sçaurois dire rien qui vaille en sa faveur. Voila toute l'Histoire, dites m'en s'il vous plait Vôtre sentiment.
Du reste c'est une veritable Comedie, que d'entendre Nôtre Professeur nouveau venu. Je souhaite que ce divertissement continuë longtemps. L'utilité que je retire de ses leçons n'est pas moindre je vous en assure: Dans sa derniere j'ay appris le nom des XIII Cantons, en Latin et en Allemand, c'en est de même de Leurs Alliés et de Leurs sujets; J'ay appris quels sont les III plus anciens Cantons. Je sçay de même que ceux d'Ury descendent originairement des boeufs, parce qu'ils combattoient en tauraux farouches, ce que l'on pourroit exprimer en Allemand, vom Ochsengeschlecht, si cela même n'êtoit pas exposé chéz nous à la rigueur de la Censure,[7] Tribunal subalterne du Saint office. Et que ceux d'Underwalden descendent des bandits de Rome, ce qui veut dire, que Nos ançêtres les plus braves, ont êté une Canaille achevée, dont specialement les premiers seroient compris dans le Probleme du Pere Bouhours, s'il êtoit possible qu'un Allemand aye de l'Esprit.[8] Voila comment il faut commencer à dresser Nos gens, pour bien gouverner la patrie, rien ne sçauroit être plus utile; Rien de plus important. Mais lorsque nôtre Professeur descend à l'Examen de Ses Etudiants, la joye de Nos jeunes eleves et des auditeurs est si grande, qu'à l'ouverture de sa bouche, tout l'auditoire s'eclate de rire: car l'on est toujours en attente d'une belle sottise, principalement lors qu'il perd son papier de vüe: car il n'est pas moins habile, que ceux, des quels on peut dire avec raison, si charta cadit etc.[9] Cependant on me dit pour certain que nôtre homme, habile à un tel point, que quelqu'un avoit attendu une inspiration du ciel, s'il devoit être preferé à moy ou non, êtoit deja terriblement degouté de sa charge, et qu'il en voudroit être quit à tout prix, fut ce même à celuy d'une des plus lucratifes charges de Nôtre Republique. En attendant je tacheray autant que je pourrois, de profiter de Ses Leçons, et j'attend deja le Mardy prochain avec une grande impatience: Aussy suis je pret, pour vous convaincre pleinement de ma docilité, de vous rendre raison de tout ce que j'apprendray. Vous ne m'accuserés plus, à ce que j'espere, que je suis Melancolique. Vous me dirés avec plus de raison, que je vous dis une infinité de Sottises. Voila pourquoy je vous en demande pardon par avance.
Le mal de la Contagion en France est trop serieux, que je ne puis pas en bonne conscience faire une digression, du ridicule precedant, à un fleau si terrible. Aix en est traitée quasi plus cruëllement que Marseille, où, selon quelques Advis, la desolation va recommencer. Dieu veuille, que sa colere s'appaise, et que ce mal si terrible ne penetre point jusques dans notre treschere et commune Patrie. Du reste en assurant Vous et Votre tres Chere famille de mes treshumbles Respects, j'ay l'honneur de Vous dire, que je seray pour jamais Monsieur mon trescher Patron Votre treshumble et tresobeissant Serviteur D.r J. Scheuchzer.
Zuric ce 8.e Xbre 1720.
Mes Compliments, je vous supplie, à M.r le Professeur Vôtre Neveu.[10]
Fussnoten
- ↑ Johann I Bernoulli an Johannes Scheuchzer von 1720.12.04.
- ↑ Zu Johannes Scheuchzers Arbeit als ehrenamtlicher Bibliothekar der Bürgerbibliothek Zürich siehe seinen Brief an Johann I Bernoulli von 1716.02.09.
- ↑ Johann Balthasar Bullinger (1690-1764).
- ↑ Beat Holzhalb (1675-1720).
- ↑ Es handelt sich um die Stelle des Landschreibers der Grafschaft Baden.
- ↑ Johannes Scheuchzer wird 1723 diese Stelle übernehmen. Zum Wahlverfahren siehe seinen Brief an Johann I Bernoulli von 1723.06.19.
- ↑ Siehe dazu Johannes Scheuchzers Brief an Johann I Bernoulli von 1720.04.14.
- ↑ Die Frage "Si un Allemand peut estre bel esprit" findet sich in Bouhours, Dominique, Les entretiens d’Ariste et d’Eugène, Paris (S. Mabre-Cramoisy) 1671, im Sachindex. Auf der dort angegebenen Seite (p. 223) wird diese Frage diskutiert. Die Stelle hat eine regelrechte Debatte ausgelöst. So bieten mehrere wissenschaftliche Zeitschriften der Zeit Beiträge dazu und Johann Friedrich Cramer hat eine Stellungnahme in Briefform verfasst, die unter dem Titel Vindiciae nominis Germanici contra quosdam obtrectatores Gallos in Amsterdam 1694 erschienen ist.
- ↑ Das vollständige Sprichwort lautet: "Si charta cadit, tota scientia vadit".
- ↑ Nicolaus I Bernoulli (1687-1759).
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