Bernoulli, Johann I an Iselin, Jacob Christoph (1716.12.24)
Kurzinformationen zum Brief mehr ... | |
---|---|
Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Iselin, Jakob Christoph, 1681-1737 |
Ort | Basel |
Datum | 1716.12.24 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 674:Bl.89-90 |
Fussnote | Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. le Dr. Iselin". P.S. am Briefkopf und Datum am Briefende eigenhändig |
Il est vrai que je trouve beaucoup de soulagement dans mon affliction par la compassion que Vous me temoignés et par les offres que Vous continués à me faire de l'assistance de Vôtre amitié tant pour moi que pour les miens soit avant soit aprez ma mort; je vous en suis infiniment obligé et j'ose Vous asseurer, que je ne laisserai passer aucune occasion pour Vous faire voir ma reconnoissance et combien je suis sensible à toutes vos honnetetés: Vous ne sçavés peutetre pas encore que depuis ma derniere lettre[1] il s'est encore fait une banqueroute, dans laquelle j'ai le malheur d'etre interessé; C'est un nommé Raup petit marchand Epicier rue des tailleurs au coin de l'Imbergässlein,[2] qui s'est sauvé, ne laissant autre chose qu'une maison qui m'etoit hypothequée pour 400 R, mais en qualité de surhypotheque (überbesserung) vû que 1300 ecus precedent ma dette, nonobstant cette precedence j'aurois esperé d'etre payé, si le malheureux banqueroutier ne m'avoit pas fait une dissimulation frauduleuse (Verhaltung) de 1000 Livres, qu'il devoit aussi à mon insçû sur sa maison à des Creanciers, qui me précedent, ce qui acheve d'oter toute mon esperance si bien que de tous mes 400 florins je n'espere pas d'en retirer un seul sol: Vous voyez mon cher Ami comme cela va au grand galop pour me ruiner, d'autant plus que je ne suis pas encore hors du danger de souffrir d'autres chocs plus grands vû qu'on marmotte deja de quelques marchands comme prets de franchir le méme pas, ce qui ne manqueroit pas de me reduire à la besace, car ce sont justement ceux, qui ont la plus grande partie de mon petit bien qui me reste entre leurs mains. Quand je considere touts ces malheurs qui m'arrivent, je ne puis autrement que croire comme je l'ai ecrit à Mr. Herman,[3] que c'est un juste chatiment de Dieu qu'il m'inflige, pour avoir quasi foulé aux pieds la tres belle fortune qu'il m'avoit montré en tant d'autres endroits et surtout celle que sa divine bonté m'avoit donnée en Hollande, là où j'étois en abondance, où j'etois à mon aise, où j'etois estimé et aimé des grands et des petits, où le magistrat me chérissoit et protegeoit contre mes ennemis, où j'aurois pu vivre toute ma vie à mon aise en honneur et en opulence, conserver mon patrimoine et l'augmenter considerablement, outre que j'aurois trouvé des occasions et de voyes aisées pour avancer et placer honorablement mes enfans par l'aide de grands et puissants patrons que j'avois dans ce pays là en grand nombre; Qu'ai-je donc fait, pauvre insensé que je suis, d'avoir quitté tous ces avantages pour les troquer contre une gueuserie[4] qu'il m'a fallu chercher dans ma Patrie; faire pour cela un long, penible, dangereux et pretieux voyage avec toute ma famille, enfin me transporter avec les miens moyennant des frais immenses dans un pays de misere, je veux dire dans ma patrie, là où ni vertu ni science ne sont estimées, où le nom de Bernoulli est plus haï que aimé, où contre un ami sincere ou deux comme Vous, j'ay un nombre innombrable d'Ennemis et d'Ennemis puissants, qui peuvent et qui cherchent à me nuire en temps et lieu, temoin bien des exemples, qui ne Vous sont pas inconnus, où je perds, où je dissipe, où je prodigue au profit des voleurs mon heritag[e,] à faute de le sçavoir loger à interest en seureté, où sans un espece de miracle je ne voi point d'apparence d'avancer jamais mes enfans; enfin où je me voi reduit à un repentir eternel de ma folie, si ce n'est pas plutot la folie de ceux dont j'ay eté obligé de suivre le conseil ou plutot l'ordre par une deference trop respectueuse mais fatale; helas que je paye cher ma sotte soumission! Encore se moque-t-on de moi, où on devroit avoir quelque egard à ma condescendance, et on me fait du tort pour le remerciement sans oser me plaindre, parce que je sçais que j'obtiendrois peu de justice. Mais c'en est trop! j'abuse de Votre patience, passons donc aux autres points de Vôtre lettre.
J'en ai lû à la Regence ce qui regarde nôtre bibliotheque; on sera fort content de l'ouvrage de Dom Monfaucon; on ne manquera pas d'en retirer un exemplaire aussi tot qu'il verra le jour et de remettre les 70 livres restans à l'endroit que Vous indiquerez. Si je ne me suis point mepris dans mon remerciment à Mr. le Baron Hogguer en parlant des recueils de tailles douces ce n'est que l'evenement qui a redressé ma meprise[5]; car en relisant Vôtre premiere lettre,[6] je conçois que par les tailles douces dont Vous y parlez on doit entendre celles qui appartiennent au Theatrum Europaeum;[7] peutetre donc que mon expression du mot de taille douce a donné occasion à Mr. le Baron de penser à nous faire ce nouveau present qui consistera à ce que Vous dites dans 27 volumes des plus rares et des plus belles gravures, en sorte que voilà une meprise heureuse et profitable, s'il en fut jamais; ce n'est pas que je pretende, qu'on m'en soit redevable, car comme j'ay deja dit je n'en suis tout au plus qu'une cause occasionelle; Je dois plutot reconnoitre avec tout le Senat Academique, qu'on Vous en a toute l'obligation, et que si Vous n'aviez pas fait le voyage de Paris, Mr. Hogguer n'auroit peutetre pas eu le temps de prendre de si genereuses resolutions en faveur de nôtre bibliotheque. On m'a chargé de Vous marquer à cet egard la joye et la grande satisfaction que la nouvelle de cette donation magnifique a excitée dans le Senat, et de Vous asseurer en meme temps de la tres bonne disposition où il se trouve pour Vous faire sentir dans les occasions les effets de sa bonne volonté. On a aussi ordonné d'ecrire encore un ample remerciment à Mr. le B. Hogguer, mais cela ne se fera qu'aprez que tous ces presents promis seront arrivés ici; car pour Vous dire en confidence on en est un peu en peine de peur que quelque mauvaise influence de la chambre de justice si redoutable pour touts ceux qui se sont enrichis au service de Louis XIV ou quelque autre desastre n'arrete et ne fasse aller en fumée toute cette belle donation; pour moi j'espere mieux. On m'a chargé de Vous dire aussi que Vous ne feriez pas mal de sonder Mr. le Baron, s'il ne voudroit pas permettre qu'on mit en parade son portrait dans nôtre bibliotheque à l'endroit où touts ses presents seront logés; on espere que s'il nous accordoit cette grace, il nous fera encore celle de nous envoyer son portrait: Quant à moy si j'ose souhaiter aussi quelque chose, j'aurois souhaité que Mr. le B. Hogguer ce genereux et magnanime bienfaiteur, qui dispense sans mesure les effets de sa noble liberalité, en eut employé une partie à nous procurer des instrumens de Mathematique et de physique pour faire des experiences dans un college experimental à l'exemple de plusieurs Academies bien etablies; je Vous asseure que cela contribueroit beaucoup à remettre la nôtre dans un meilleur etat en attirant les Etudians, qui jusqu'à present sont allés ailleurs seulement parceque tout paroit endormi ici, n'y ayant aucun exercice qui frappe les yeux et qui excite la curiosité; le Lustre et la renommée de la beneficence de notre Mecenas seroit aussi repandue avec plus de vigueur aux pays etrangers par le grand nombre de toute sorte de gens, qui verroient tous les jours l'exercice de ces instrumens; Quelques uns de nos Professeurs sont aussi de mon sentiment; ce ne sont que les envieux et les ignorans, qui peutetre ne le souhaitent pas. J'ai fait vos compliments à tous nos Messieurs, ils Vous font les leurs reciproquement, temoignant tous avec moi grand desir de Vous revoir au plutot en parfaite santé.
Sur le rapport que Mr. le Cons. Falckner m'avoit fait que Mad.e la Marquise d'Avarai paroissoit avoir envie de me connoitre, je pris la liberté de Lui ecrire une lettre, à laquelle elle repondit le plus obligeamment du monde; je Lui ecrirai une seconde lettre la semaine prochaine pour Lui souhaiter une heureuse nouvelle année; me voila donc embarqué avec elle dans un commerce de lettre sans sçavoir si je m'y soutiendrois avec honneur, car peutetre a-t-elle conçu plus d'opinion de moi, que je ne serai en etat de remplir.
C'est bien notre pauvre Mr. Wetstein, qui est malade mais c'est le D.r Wetstein, il est meme malade de corps et d'esprit; on ne croit pas qu'il en revienne: de sorte qu'il y a peutetre une vacance avant Vôtre retour à moins que Vous ne le hatiez.
J'ai fait Vôtre compliment à mon frere le Cons. sur l'avancement de son fils; il Vous remercie et recommende son fils à Votre affection; il m'en a prié d'une voix languissante, car sa toux jointe à un asthme, qui fait pitié l'a tellement abattu, que je crains pour sa vie, il y a longtemps, qu'il ne peut plus sortir de chez Lui; selon toute apparence humaine il ne trainera pas longtemps aprés le nouvel an: Dieu le veuille soulager dans ses angoisses et le consoler de son S. Esprit. Mr. le D.r Harscher me dit, qu'il Vous a envoyé il y a plusieurs semaines le fer lui meme, qui porte la mesure de nôtre pied; il l'avoit donné à Mr. Deucher, qui s'en etoit chargé pour Vous le faire tenir, ensorte que Vous le devés avoir reçu à present. Voici quelques commissions qu'on m'a données pour Vous. 1.o Mr. le Dr. Beck Vous prie de Vous informer de Mr. de Bary de Geneve et de ses affaires, c'est que celui-là est aussi enveloppé dans la banqueroute de celuici, dont on a flatté les Creanciers, qu'ils seront payés entierement, dès que le Roi payera de Bary. 2.do Mr. Buxtorff nôtre Doyen Philosophique m['a] dit que Mr. Frey im Gnadenthal est curieux de sçavoir, si Vous avez delivré les 2 lettres de recommendation, qu'il Vous avoit données avant Vôtre depart, l'une pour Mad.e la Duchesse d'Orleans Mere du Duc Regent[8] et l'autre pour Mr. le Marquis de Puisieux et quel effet ces 2 lettres auront produit. 3.o Mon frere le Droguiste qui Vous asseure de ses respects Vous prie fortement de prendre la peine d'aller par occasion chez Mr. Bazin maitre Peintre, dont il Vous envoye ici l'adresse imprimée, et de Lui demander à quel prix il vend presentement le plus beau Carmin; mais il faut qu'il dise d'abord le plus juste prix sans marchander car mon Frere voudroit prendre une livre à la fois si le prix l'accommodoit, en ce cas il Vous remettroit l'argent avec celui que je Vous remett[rai] aprés l'occasion presente. Mr. Varignon qui acheta autrefois du meme Bazin quelques Onces de Carmin pour mon Frere aura peutêtre la bonté de Vous accompagner en allant chez Basin, dans l'esperance qu'il sera plus raisonnable en consideration de Mr. Varignon qu'il connoit: le Carmin doit etre tres beau, car il y en a de differente sorte; c'est donc du meilleur que mon Frere souhaite; il Vous prie de demander en meme temps les prix du plus beau veritable outremer et des moindres sortes: Si Mr. Varignon connoit peutetre un autre marchand de Couleurs, qui soit plus raisonnable que Bazin, il pouroit Vous y mener, pour en prendre information des prix. Cependant Vous aurez soin s'il Vous plait de garder cette adresse imprimée, jusqu'à Vôtre retour pour la rendre à mon frere avec ce que Vous aur[ez] acheté pour Lui selon qu'il Vous priera aprez, qu'il aura appris ce que Vous m'aurez repondu; Aprez avoir restitué au fisc du Recteur les 60 ecus especes que j'en avois emprunté pour Vous, j'ay changé tout le reste de Vôtre argent en especes, ce qui fait une somme de 101 ecus; je Vous remets donc suivant Vôtre ordre par Mr. le Cons. Beckel cent et un ecus especes, dans cet argent est compris le reste du second quartier de Vôtre pension avec le second praemium diligentiae, vingt ecus especes que Mad.e Vôtre Mere m'a envoyé[9], un Louis blanc que je Vous donne pour etrenne comme Recteur, 9 florins que Mr. l'Antistes comme Doyen de Vôtre faculté m'a remis pour Vous pour etrennes et enfin cent florins que le même m'a envoyé du Fisc de la bibliotheque de Vôtre faculté pour Vous les faire tenir, c'est apparemment pour acheter des livres: Voila tout ce que j'ay reçu pour Vous depuis la premiere remise; le conte que je tiens tres-exactement du credit et du debit, Vous montrera le tout plus en detail; Je dirai au Pedau[10] comme Vous souhaités, que Vous Lui donnerez les etrennes à Vôtre retour. Mr. l'Archidiacre Mangold a cedé en donation à ses Enfans la Seigneurie de Klubeck[11] estimée de 12000 écus. Mr. le Conte Palatin avec sa Femme et sa Soeur en a dejà pris possession et y demeure actuellement; ils contenteront leur Soeur Mad.e Studer de son tiers en argent comptant. Ma Femme Vous salue tres officieusement: Elle Vous souhaite aussi bien que moi une heureuse nouvelle année, avec les plus precieuses benedictions du Ciel: Plus le terme de Votre retour approche, plus il me tarde de Vous revoir: A Dieu mon cher Ami, je Vous baise les mains, en Vous assurant que je ne cesserai de ma vie d'etre Votre tres-humble et tres obeissant Serviteur J. Bernoulli.
à Bale ce 24. Xbre 1716
P. S.[12] Dieu a delivré mon frere[13] de ses angoisses par une mort douce et tranquille aujourdhui 25. jour de Noel entre 4 et [5] heures du soir.
Fussnoten
- ↑ [Text folgt]
- ↑ Ecke Schneidergasse / Imbergässlein
- ↑ [Text folgt]
- ↑ Im Manuskript steht "gueserie".
- ↑ Im Manuskript steht "reprise".
- ↑ [Text folgt]
- ↑ [Text folgt]
- ↑ Elisabeth Charlotte von der Pfalz, Herzogin von Orléans.
- ↑ Im Manuskript steht "envoyez".
- ↑ Gemeint ist wahrscheinlich "bedeau", der Pedell.
- ↑ Klybeck, ein Stadtteil von Basel an der Mündung der Wiese in den Rhein.
- ↑ Dieses P. S. befindet sich im Manuskript auf dem Briefkopf, fo. 89r.
- ↑ Niklaus der Ältere (1662-1716) war der zweite der älteren Brüder von Johann I Bernoulli.
Zurück zur gesamten Korrespondenz