Bernoulli, Johann I an Arnold, John (ca. 1688-17..) (1716.08.15)
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Autor | Bernoulli, Johann I, 1667-1748 |
Empfänger | Arnold, John, ca. 1688-17uu |
Ort | Basel |
Datum | 1716.08.15 |
Briefwechsel | Bernoulli, Johann I (1667-1748) |
Signatur | Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 673:Bl.15-16 |
Fussnote | Am Briefkopf die alte Nummer "8" sowie Datum und "à Mr. Arnold Dr. en Medecine à Exon en Angleterre" eigenhändig |
Monsieur
Vôtre Lettre du 6. Avril, que je n'ai reçu avec les pieces dont Vous me faites present et dont je Vous remercie, que depuis peu, m'a fait un double plaisir, en ce que non seulement j'ay appris par elle Vôtre heureux retour en Angleterre aprez un si long voyage, mais aussi que je voy, que Vous ne m'oubliez pas, et que ni le temps ni l'eloignement [n]'est capable de m'efacer de Vôtre memoire. J'ai parcouru le traité des incremens de Mr. Taylor,[1] mais pour Vous avouer, il faut que je sois bien stupide de n'en entendre pas le tiers; cependant toute la consolation que j'ai, est qu'il y aura peutetre d'autres gens plus eclairés que moi, qui n'y comprendront pas plus que moi, je crois que l'Autheur Lui meme ne s'entend pas par tout: Le peu qui n'a pas echappé mon entendement me donne à connoitre que l'Autheur a tasché de nous donner pour ses propres inventions de vieilles choses en les enveloppant dans les voiles d'obscurités. Par ex. ce qu'il a sur les Isoperimetres est pris de mon Frere, la methode, dont il se sert pour les courbes des chainettes, se trouve dans ma theorie de la manoeuvre des vaisseaux, et ailleurs, comme aussi celle pour les courbures des linges, des voiles, des cordes etc. courbées par la pression des fluides: Pour ce qui est de la methode pour le centre d'oscillation, que l'Autheur propose elle est si visiblement la meme avec la mienne communiquée dans les Actes de Leipsig de 1714[2] qu'il ne falloit encore que mes paroles pour faire voir aux stupides, que quand il ecrivit cet endroit de son traité il avoit devant les yeux ma piece inserée dans les dis Actes de 1714. Je m'etonne qu'on souffre de semblables larcins chez Vous, où on se recrie tant contre les plagiaires etrangers; Mr. Keil qui veut etre le Redresseur des torts comme un autre Dom Guichote devroit ce me semble purger son propre pays de voleurs avant que de faire la guerre à ceux du dehors; mais ce vaillant avanturier apprehende, qu'on ne Lui reproche que Lui meme n'est pas exemt du crime d'avoir pillé les inventions d'autrui.
L'estampe[3] de Mr. Newton dont Vous m'avez regalé me paroit tres bien gravée, je Vous en suis obligé, Mr. le Dr. Stehelin qui Vous fait ses complimens et qui recueillit autant qu'il peut trouver des portraits de Personnes celebres, souhaiteroit fort aussi un exemplaire de cette etampe, je Lui ai offert par Honneteté la mienne, mais il ne voulut pas m'en priver.
Le probleme dont Mr. Leibnits Vous a ecrit[4] que j'ay donné une solution generale consiste à determiner la courbe, qui coupe à angle droit une infinité de courbes données par une meme loi: si je me souviens bien, je Vous ai fait part autrefois de cette solution; ce qu'il y a de plus difficile là dedans, c'est que si les courbes données sont transcendentes elles rendent souvent impraticable la solution generale; souvent aussi dans les courbes données algebraiques on arrive à une equation differentielle dont les indeterminées ne se laissent pas separer.
Mon Fils se trouve presentement à Venize chez Mr. Michelotti,[5] qui est tres content de Lui et me prie de le Lui laisser longtemps pour profiter, comme il dit, de ses conversations sur les Mathematiques: mais je souhaiterois que mon Fils put continuer ses voyages; il me mande qu'il a esperance de pouvoir faire le voyage d'Angleterre dans la suite d'un Ambassadeur Venitien qu'on y envoyera peutetre bientost pour relever celui qui est sans doute presentement à Londres, s'il n'en est pas parti avec le Roi, en cas que ce voyage reussisse, il aura l'avantage de Vous rendre visite à Exon, ce qui Lui fera beaucoup de plaisir; je Vous le recommende donc par avance.
Mr. Leibnits m'a aussi mandé qu'il avoit reçu une lettre de Mr. Newton, mais qu'elle etoit écrite à Mr. l'Abbé Conti, et que celuici la Lui avoit communiquée sur la priere de Mr. Newton;[6] que Mr. Newton avoit fait cette demarche aprez avoir remarqué que Mr. Leibnits ne daignoit pas de repondre à Mr. Keil; ainsi que cette lettre de Mr. Newton n'avoit eté ecrite que pour entrer Lui meme en lice avec Mr. Leibnits, bien loin de s'accommoder sur l'affaire des calculs: Mr. Verzalia cet Italien qui a demeuré chez moi il y a 7 ou 8 ans et qui m'a causé tant de chagrin en remerciment de ma peine et de la fidelité avec laquelle je l'ai instruit dans la Geometrie sublime,[7] comme Vous en aurez entendu parler dans le temps que Vous etiés ici, ce Verzalia, dis-je, semble vouloir decider cette querelle, en disant (à ce qu'on m'ecrit) dans un livre publié[8] et rempli d'injures contre Mr. Herman, que si l'Italie n'avoit produit des Galilées, des Cavalleris, des Borellis, les ultramontains n'auroient jamais pu se vanter des Wallis, des Newtons, des Leibnits, mais ce qui est surprenant, entre tant d'injures il n'y a pas un seul mot d'injurieux contre moi, je ne sçai d'où vient ce menagement aprez tant de marques de sa noire ingratitude, si ce n'est peutetre parcequ'il ne daigne pas me nommer. J'ai preté à mon Neveu le fragment des Transactions de Londres, que Vous avez eu la bonté de m'envoyer; il y a là quelque chose sur les chainettes,[9] mais tout ce que l'Auteur en dit est connu dès longtemps, hormis une remarque qui est assez curieuse, c'est que la courbe qui se décrit par le developpement de la chainette est la tractrice de Mr. Huguens, dont la tangente est par tout d'une egale longueur. Puisque Vous m'offrez de si bonne grace Vos services, j'ose bien Vous prier de m'envoyer de temps en temps ces sortes de pieces curieuses, qui s'impriment en Angleterre, pourvû qu'elles ne Vous coutent pas trop, car autrement j'aime mieux ne les avoir pas ou ne les avoir qu'à condition, que Vous m'en disiez le prix. Quand Vous parlerez ou ecrirez par occasion à Mr. l'Abbé Conti, je Vous prie de Lui faire mes compliments reciproques et de Lui dire que je n'ai jamais travaillé sur le denombrement des courbes tertii ordinis, parce que ce travail m'a toujours paru trop sec et trop inutile pour y perdre mon temps; mais feu mon Frere s'y appliqua autres fois, temoin un ecrit trouvé entre ses papiers,[10] qui sont tombés entre les mains de Mr. Herman et dont il sçait faire bon usage pour en paroitre Auteur: mon Neveu s'etant souvenu d'avoir vu cet ecrit du vivant de mon Frere, le demanda à Mr. Herman, qui ne le pouvant honnetement refuser, Lui en envoya dernierement une copie:[11] mais il s'en faut bien, que cette matiere n'ait été achevée par mon Frere, ni prete pour voir le jour. Vous dites qu'il n'y a presque personne, qui comprenne ce que Mr. Newton a donné sur le meme article; je suis donc bien aise que je ne sois pas le seul qui se plaigne de l'obscurité de Mr. Newton, il faut souvent plus de peine et plus d'application pour entendre ce qu'il veut expliquer, que pour l'inventer soi meme sans le secours de Mr. Newton, comme Vous en avez vû Vous meme l'experience, lorsque je Vous avois expliqué une bonne partie de ses Principes phil. math. en demontrant ses theoremes par mes propres methodes bien plus aisément que par ses demonstrations. Mais il faut que je finisse. Mon Neveu qui Vous fait ses complimens a été nommé Professeur des Mathematiques à Padoue. Il attend tous les jours la lettre de vocation. Je suis Monsieur Vôtre tres-humble et tres-obeissant Serviteur J. Bernoulli.
Fussnoten
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