Barbaud (de Thiancourt), Henri-Alexandre an Bernoulli, Johann I (1719.10.23)

Aus Bernoulli Wiki
Version vom 8. Januar 2019, 11:36 Uhr von Gehr (Diskussion | Beiträge)
(Unterschied) ← Nächstältere Version | Aktuelle Version (Unterschied) | Nächstjüngere Version → (Unterschied)
Zur Navigation springen Zur Suche springen


[Noch keine Bilder verfügbar]


Kurzinformationen zum Brief       mehr ...
Autor Barbaud (de Thiancourt), Henri-Alexandre, 1686-1739
Empfänger Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Ort Lille
Datum 1719.10.23
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 725:Bl.91-101
Fussnote Bl.91: Adresse Bl.97: Figur Der Brief enthält Thiancourts Essai "Expressions generales des sommes des six premières Puissances reduites à une même denomination".



A Monsieur

Monsieur Bernouli Proffesseur

des mathematiques à Basle et

Membre de L'accademie

Royale des sciences à Paris, de

Celle de Berlin, et de la societé

Royale de Londres;

Illustre entre les

Sçavants,

Et digne de tous ces Postes qu'Il

remplit avec distinction.

File icon keinbild.gif Monsieur

Je me souviens que vous me fites l'honneur de me dire la derniére fois que j'ay êté en Suisse que vous aviez trouvé la maniere d'exprimér analitiquement par des formules infiniment generales les sommes des Puissances dont les Racines suivoient la progression naturelle des nombres. J'avois deja trouvé alors celle de reduire à de pareilles expressions les sommes des nombres triangulaires, des quarrez et des cubes en me servant de methodes particuliéres. Mais peu content d'une recherche trop bornées, J'ay essayé Monsieur à vôtre exemple de resoudre ce probléme d'une maniére generale et qui put s'appliquér à toutes sortes de puissances, à quelque degré qu'on les fit montér. Je vous avourai cependant Monsieur, que depourvu du secours de L'analise, elle ne m'a servi qu'à donnér à mes expressions toute L'étendue dont elles File icon keinbild.gif sont susceptibles. La methode que j'ay suivie est purement arithmetique, et je crois même qu'il seroit difficille d'en trouver une plus abregée quelque longue qu'Elle parroisse. Voicy en quoy cette methode consiste.

J'ay consideré, en 1.r lieu la Nature des Progressions de divers ordres qui derivent d'une Constante quelconque, fixe, et aprés avoir exprimé leur Valeur par des formules infiniment generales; J'ay cherché en 2.d lieu à determiner tous les changements qui peuvent arrivér dans ces sortes de progressions lorsque leur constante varie dans un ou plusieurs termes.

La chose resolue, il m'a êté facile de reduire à de pareilles formules l'expression de tous les nombres piramidaux possibles, dont la premiére Constante etant toujours 1, toutes les autres conservent entre elles la même valeur.

Les sommes des Puissances seroient sans doute Monsieur determinées par cela seul, si ces sommes formoient une suite de nombres Piramidaux Reguliérs. Mais les sommes des Puissances se reduisant à une Constante File icon keinbild.gif qui ne devient fixe que lorsque le nombre de ses termes egale le nombre d'unitez qui entrent dans l'exposant de la Puissance dont on cherche à exprimér les sommes; Il est evident qu'on est obligé de recourir à la methode dont je viens de parlér pour reduire à une formule generale les sommes de ces progressions piramidales irreguliéres, Et c'est en quoy consiste l'une des difficultez de ce problême: Car devant connoitre la suite irreguliére des Constantes d'une progression de puissances pour pouvoir determinér la valeur de ses sommes, on est obligé d'en venir à des soustractions reïterées assez longues lorsque la puissance donnée est d'un degré un peu elevé.

L'autre difficulté nait des operations à quoy engage l'Irregularité que produit dans ces sortes de progressions la variation de leurs Constantes. Il me seroit aisé d'eclaircir ce que je dis icy par des Exemples, si je ne parlois à une Personne trop habile pour être aretée par des idées metaphisiques quelques File icon keinbild.gif abstraites qu'elles puissent être. Je me reserve dailleurs le plaisir de vous communiquér ma methode, et de la soumettre Monsieur à vôtre Jugement la premiere fois que j'aurai l'honneur de vous revoir. Je me borne donc à present aux remarques suivantes.

1. Dans les progressions que forment la suite des sommes des Puissances, la Constante ne devient fixe qu'au terme exprimé par leur Exposant, sçavoir au 2.d terme dans les quarrez; au 3.e dans la progression des Cubes; au 6.e terme dans celle des sixiemes Puissances. etc.

2. La Constante fixe d'une progression des Puissances est toujours egale au produit successif de l'Exposant de cette puissance, ou au nombre de fois que les unitez qui le composent peuvent être permutées. 120 par exemple est la Constante fixe de la progression des Cinquiemes puissances; 40320 de celles des 8.mes etc.

3. La Variation des Constantes d'une puissance est toujours telle que la somme des Extremes de ses constantes variables est egale à sa Constante fixe.

4. La formule qui exprime la Valeur des sommes File icon keinbild.gif d'une puissance, surpasse toujours cette même puissance d'un degré.

5. Les Exposants des 3 premiérs termes des formules vont toujours en diminuant d'une unité; L'Exposant du 4.e terme est de deux unitez moindre que celuy du 3.e et de même du 5.e et de tous les autres termes à l'Infini dont l'Exposant va toujours en diminuant de deux unitez à mesure qu'il s'eloigne de celuy qui le precede immediatement.

6. La formule qui exprime la Valeur des Puissances du 1.r degré est composée de 2 termes.

Celle des 2.me et 3.me degrez l'est de 3.

La formule des Puissances[1] du 4.me et 5.me degré de 4.

Celle des puissances des 6.mes et 7.mes degrez de 5.

Des 8.mes et 9.mes degrez de 6 et ainsi de toutes les autres formules à l'Infini en augmentant toujours d'un terme pour deux degrez qui se suivent immediatement.

7. Les 3 premiers termes d'une formule sont toujours positifs; Les autres alternent de moins en plus.

File icon keinbild.gif 8. Les Coëfficients des 3 premiérs termes d'une suite de formules reduites à une même denomination gardent entre Eux un ordre invariable.

Les Coëfficients des premiérs termes sont dans une progression harmonique decroissante: Ceux des seconds termes ne changent jamais; Et ceux des troisiemes termes forment entre eux une progression arithmetique qui va en augmentant.

Les Coëfficients des autres termes n'ont rien de reguliér; Ils se sentent de la Variation de leurs Constantes. Je ne donnerai icy qu'un Exemple pris des six premiéres puissances, quoy que j'aye les formules des dix premiéres toutes calculées, et qu'on puisse par cette methode determinér la Valeur de ses sommes, à quelque degré qu'on eléve une puissance.

Expressions generales[2] des sommes des six premiéres Puissances reduites à une même Denomination.

Puissances

1.res .

2.des .

3.es .

4.es .

5.es .

6.es .

Mr. Riecken officiér de nôtre Regiment entendu dans l'analise à qui j'ay communiqué cette methode m'a êté d'un grand secours dans la Recherche de quelques formules; Il ne comprend pas Monsieur, non plus que moy comment Vous avez pû parvenir à determinér cés mêmes formules par le seul secours de l'analyse, la methode dont je me suis servi nous paroissant à tous deux la seule qu'on puisse employér à la recherche d'un Probléme aussi compliqué. Cependant Monsieur, comme vos vuës sont beaucoup plus etendues que les notres, si vous aviez une methode analitique de resoudre ce Problême, vous nous feriez un sensible plaisir de nous la communiquér.

Je passe des preuves abstraites, tirées de la Nature des nombres, à des conjectures sur la File icon keinbild.gif Phisique.

M.r Descartes a cru, et beaucoup de Philosophes à son exemple, qu'un corps mû en rond tendoit à s'echappér par une tangente à la Circonference du cercle qu'il decrivoit: on a supposé la même chose des corps liquides, et m.r de la Hire le fils, mort depuis peu, m'a Luy même assuré qu'il avoit fait des Experiences qui veriffioient ce princippe.

Je n'entrerai point dans le detail d'une Experience que j'ignore; mais j'ay lieu de croire, que bien loin que les Corps solides ou liquides mûs en rond tendent à s'echappér par une ligne tangente au Cercle qu'ils decrivent; leur direction les determine au contraire à s'eloignér en ligne droitte du Centre de leur mouvement. Je me fonde en raisons et en Experiences.

Mes raisons sont, que la tendance d'un Corps à un mouvement n'estant autre chose que l'Effort que ce Corps fait pour se mouvoir suivant une direction determinée; ce Corps parcoureroit effectivement cette direction, si faisant cessér l'obstacle qui le File icon keinbild.gif retient, il passoit d'une simple tendance au mouvement à un mouvement actuel: le Princippe est trop clair pour pouvoir être contesté. Or dez qu'on l'admet une fois, on ne peut plus niér qu'une pierre muë violemment dans[3] une fronde ne tende à s'echappér par le rayon continué du Cercle qu'elle decrit; L'extréme tension de la Corde prouvant assez que la direction de cette pierre est dans une ligne tirée du Centre de son mouvement par son Centre de gravité.

Il me semble dailleurs que tout corps, de quelque nature qu'il puisse être, mû en rond avec violence acquiert par cela seul une force qui tend à le faire eloignér du Centre de son mouvement par une ligne directement oposée à celle qui l'en rapprocheroit, puisque la direction de ces deux mouvements est precisement oposée, ce qui ne se peut faire que lorsque la ligne de direction du Corps mû parcourt un rayon prolongé.

Je viens aux experiences: elles sont fort File icon keinbild.gif simples, et communes Monsieur dans les Lieux où vous êtes. La seule fête des tonneliérs m'en fourniroit plus d'un Exemple. On voit tous les jours des Enfants faire tournér avec rapidité un cercle qu'ils tiennent à la main, sans qu'une Pierre posée sur ce cercle tombe, ou que la liqueur dont un vase soutenu par ce cercle est rempli se repande, ce qui ne pouroit pas arrivér si la direction de l'effort ou de la tendance au mouvement qu'imprime à cés corps etrangérs le mouvement du Cercle n'etoit dans une direction precisement oposée au Centre de leur mouvement, et non le long d'une tangente à la Courbe que ces corps decrivent: un peu de reflexion mettra cette Verité dans son jour.

[Figur folgt][4] est un cercle mobile autour du point fixe . est une elevation en forme de piramide clouée sur la surface interieure du Cercle , dont le sommet un peu applati est diametralement oposé au Centre de mouvement . Soit posé sur cette Elevation File icon keinbild.gif un corps quelconque ; Je dis que si on fait tournér avec vitesse le cercle , autour du point fixe , le corps demeurera fermement attaché à l'elevation , dans quelque situation qu'on suppose ce cercle, ce qui ne pouroit pas arrivér si la Direction de l'effort qui determine le corps à se mouvoir ne se faisoit le long de la ligne , prolongement du rayon , puisque rien ne retiendroit ce corps, s'il tendoit à se mouvoir selon toute autre direction. Le peu de fondement de cette opinion parroitra encore plus evidemment, si on examine la Direction que le corps devroit avoir lorsque le Cercle est parvenu dans une situation où le Diamétre forme une ligne horizontale;[Figur folgt][5] car selon Descartes et ses sectateurs, le Corps , etant determiné allors, tant par le mouvement du Cercle , que par son propre poids à parcourir la tangente , sans que rien s'opposat à son effort, il est indubitable que si leur sentiment etoit conforme aux Loix de la File icon keinbild.gif Nature, le corps abbandonneroit la piramide pour se mouvoir avec rapidité le long de la droite , contre ce que l'experience montre tous les jours.

Ce que nous venons de dire des corps solides se peut egalement appliquér aux Liqueurs; Et si on soutenoit que la force imprimée à une Liqueur pour se mouvoir le long de la tangente etoit assez grande pour surmontér entierement la direction que son propre poids donne à toute Liqueur; il s'ensuivroit qu'un Vase ouvert par le bas pouroit être mû aisement le long d'un plan horizontal sans que la liqueur qu'il contient se repandit, puisque cette situation repondroit parfaitement à celle qu'a le meme Vase lorsque le point du Cercle est parvenu directement audessus du point fixe .[Figur folgt][6] Ajoutez à ce que nous venons de dire, que si la liqueur contenue dans un Vase, tendoit effectivement de même que ce Vase à se mouvoir le long de la tangente, il s'ensuivroit que le Vase qui la contient devroit se renversér du Coté File icon keinbild.gif où la liqueur tend à se mouvoir, puisque agissant seule sur le coté de ce Vase oposé à son mouvement, il ne trouveroit rien qui le contrebalanceat du coté oposé. Telles sont Monsieur les raisons qui me portent à croire que tout corps mu en rond avec un certain degré de vitesse, tend à s'echappér par le rayon continué du Cercle qu'il decrit, et non par une tangente au même cercle. M.r de Cassini le fils m'a parru panchér vers cette opinion; peut être un peu plus de reflexion le determinera entiérement. J'aurai l'honneur de luy communiquér mes conjectures et de vous priér Monsieur et l'un et l'autre de vouloir bien me marquér ce que Vous en pensez.

Mais si je me trouve en cela d'un sentiment diferent de celuy de m.r Descartes, je crois comme Luy que toute matiére est Homogéne ou d'une même nature, quelque diversité qui se remarque entre les Corps qui tombent sous nos sens. File icon keinbild.gif Mon opinion est fondée sur l'egalité de l'acceleration des corps inegaux en poids qu'on laisse tombér. En effet, il parroit que cette egalité d'accelleration dans la chutte des Corps inegalement pesants ne peut être causée que par ce que les particules indefiniment petites qui composent le propre Volume de chaque corps pesent egalement prises d'une même grosseur, de sorte que l'accelleration de l'une etant egale à l'accelleration de l'autre, elles doivent toutes descendre avec une même vitesse, soit qu'elles se trouvent reunies ou separées; ou qu'il y entre dans la Composition des corps un plus grand, ou un moindre nombre de ces particules.

Et il seroit inutile d'objectér qu'on remarque quelque diference de tems dans la chute des corps inegalement pesants lorsqu'ils tombent d'un lieu fort elevé; Car la vitesse de leur chute n'êtant point proportionnée à la diference de leurs poids, quoy qu'egaux en File icon keinbild.gif figure et en volume, il s'ensuit que la raison de cette diversité vient d'une cause etrangére, et non de l'inegalité de[s] poids de leurs particules solides: aussi les voit-on descendre avec une même rapidité dans la machine du Vuide où la plume tombe aussi vite que le plomb; d'où l'on peut conjecturér avec assez de Vraissemblance que la substance de toute matiere est uniforme, puisque les particules qui composent la matiére propre de chaque Corps pesent egalement, ce qui revient à l'opinion de Mons.r Descartes.

Mais je ne m'apperçois pas que le plaisir de vous entretenir m'emporte au delà des justes bornes d'une lettre. C'est là Monsieur, un de ces inconvenients où l'on tombe lorsqu'on se livre aussi facilement et avec autant d'honnêteté que Vous le faites; quelque fois le merite devient à charge, File icon keinbild.gif et une reputation trop brillante attire des importuns. Dûssai-je cependant passér pour tel, je ne sçaurois Monsieur me repentir d'avoir ecrit, si la liberté que j'ay prise vous engage à me decouvrir vos sentiments. J'ay l'honneur d'etre avec toute la Consideration possible Monsieur Vôtre trés humble et tres obeïssant serviteur de Thiancourt.

À Lille ce 23.e 8.bre 1719.

Permettez moy Monsieur d'assurér icy de mes respects Madame Vôtre Epouse et nôtre Illustre ami Mons.r Iselin.


Fussnoten

  1. Im Manuskript steht "Puissance".
  2. Im Manuskript steht "generale".
  3. Das zweite "dans" im Manuskript wurde gelöscht.
  4. [Link folgt] Im Manuskript steht am Rand "fig. 1.re"
  5. [Link folgt] Im Manuskript steht am Rand "fig. 2.de".
  6. [Link folgt] Im Manuskript steht am Rand "fig. 3.e".


Zurück zur gesamten Korrespondenz