Bernoulli, Johann I an Maupertuis, Pierre Louis Moreau de (1731.06.26)

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Kurzinformationen zum Brief       mehr ...
Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Maupertuis, Pierre Louis Moreau de, 1698-1759
Ort Basel
Datum 1731.06.26
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 662, Nr.11
Fussnote Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Maupertuis". Datum und Signatur eigenhändig. Letztes Blatt leer



File icon.gif Monsieur

Vous aurés vû par la lettre que mon fils Vous écrivit ces jours passés[1] la raison pourquoi j'ai differé la reponse à la V.e très agreable du 11 Juin;[2] C'est qu'on m'a forcé malgré moi à accepter le Doyenné de nôtre faculté que j'avois refusé l'année passée, mais qu'il m'a fallu subir cette fois sans misericorde, c'est une charge très penible sans profit, mais accompagnée de beaucoup de travail et de chagrin, en sorte que pendant une année entiére j'aurai peu de relache, pour vaquer aux meditations de Mathematiques. Dans la situation facheuse de mes affaires delabrée rien n'auroit pû m'arriver de plus importun que cette charge qui achève de me troubler l'esprit, au lieu de me donner du repos pour courer ma Melancholie dans quelque solitude.

Vous moralisés M.r d'une maniére admirable: Si j'avois assés de fermeté et de grandeur d'ame je pourrrois profiter de V.e morale pour ma Consolation, les richesses d'esprit que Vous m'attribués si liberalement et que ni les Banqueroutes ni les Revolutions des Etâts ne sauroient m'enlever, dites Vous, reparent abondamment la perte que je viens de faire des File icon.gif Biens corporels, quelle source de Consolation n'y trouverai-je pas? Mais Vous n'y pensés pas, mon cher Mons.r car toutes ces Richesses prétendues d'Esprit que je dois posseder, me laisseroient mourrir de faim s'il ne me restoit plus rien pour nourrir le Corps, sur tout dans un pays comme le notre où la marchandise d'esprit n'a point de cours, quelque bon marché qu'on voulût la vendre. Oui, si les Rois et les Princes en souhaitoient, je pourrois bien leur en envoyer quelques Ballots, comme font les gros marchands, qui envoyent dehors leurs marchandises, quand ils ne peuvent plus les debiter chés eux; Je suivrois l'exemple de M.rs Viviani, Huguens et d'autres qui ont tiré des grosses pensions sous le Regne de Louis le Grand, pour ce qu'ils ont fourni de tems en tems à la France de leurs Manufactures d'Esprit, qui furent tellement recompensées, que le Roi fit batir à Florence un beau Palais pour Viviani; mais ces tems heureux pour les beaux Genies ne reviendront plus; je me souviens à cette occasion d'un vers d'Ovide; le voici: Ingenium quondam fuerat pretiosius auro; at nunc File icon.gif Barbaries grandis habere nihil.[3]

L'aplaudissement que Vous donnés à ma Theorie sur les Corps qui glissent [4] me causse bien du plaisir, d'autant plus que j'avois peur de ne m'être pas expliqué assés clairement dans une matiére si nouvelle, qui donne plus de peine pour se faire entendre que pour l'inventer. Vous y aurés remarqué que j'ai suposé le principe réçû que le Centre de gravité des Corps qui se choquent conserve aprés le choc sa direction et sa vitesse qu'il avoit avant le choc; M.r Newton en a bien demontré la verité pour deux Corps qui se choquent, mais ni lui, ni personne autre que je sache n'en a point donné la Demonstration pour plusieurs Corps qui se choquent à la fois; Vous m'en avés Vous même proposé cette difficulté lorsque Vous etiés ici, sans que je fusse alors en étât de la resoudre pleinement. Mais à cet heure je me suis satisfait là dessus parfaitement car dans le tems que j'étois plongé jusqu'aux Oreilles dans les meditations sur la d[it]e Theorie, j'ai trouvé une Demonstration generale du principe supposé pour autant de Corps File icon.gif chocant que l'on voudra; Je souhaiterois de tout mon coeur de Vous en faire part, mais les Distractions et l'inquietude où je me trouve presentement et qui dureront peutètre encore longtems me mettent dans une entiére impuissance de coucher par écrit mes pensées; il me faut attendre que le trouble de mon Esprit se dissipe pour me tranquilliser.

Je Vous renvoye M.r V.e piéce sur la figure d'un Sphèroide etc.[5] quoique j'aye deja lû vos deux premiers Ecrits en françois sur cette matière, je n'ai pas laissé de lire encore celuici et de l'examiner avec toute l'attention dont j'êtois capable; J'ai trouvé ce morceau très beau et très bien écrit en latin; quant à moi je Vous avoue franchement que je n'aurois pas pû si bien faire. Cependant puisqu'Oculi plus vident quam oculus; je me suis servi de la liberté que Vous m'avés donnée de changer ou de corriger ce que je trouverois à propos; J'ai donc mis à la marge mes avis et Remarques, et quelques petites Corrections dans le texte; c'est à Vous à les File icon.gif examiner, si Vous trouvés que j'ai tort Vous n'avés qu'à les considerer comme non faites, et les rejetter entiéremt ou en partie, selon que Vous trouverés bon. Je ne sai si j'ai bien compris l'idée que Vous avés du mot Effluvium qui compose V.e Spheroide, ce que les Physiciens entendent ordinairement par Effluvium, c'est la matiére subtile qui emane ou qui sort de certains Corps, comme celle de l'aimant ou de l'ambre jaune, qui forme une espèce d'atmosphère ou de tourbillon à l'entour de ces Corps; mais comme aparemment Vous n'entendés pas cela par votre Effluvium, j'ai changé ce mot en celui de fluentum, qui signifie un amas de matiére fluide qui coule doucement et avec une vitesse uniforme, comme celle du spheroide formé dans la matiére fluide qui circule autour de l'axe . Il est vrai que mon fluentum ne me contente pas tout File icon.gif à fait, mais pourtant un peu plus que Votre Effluvium; Je l'ai donc mis faute d'un autre terme plus significatif. Vous en choisirés.

Je Vous embrasse avec les plus tendres sentiments d'amitié et suis avec un attachement inviolable Monsieur J. Bernoulli.

Bàle ce 26. Juin 1731.


Fussnoten

  1. [Text folgt]
  2. [Text folgt]
  3. Ovid. am. III 8, 3ff.
  4. [Text folgt]
  5. [Text folgt]


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