Bernoulli, Johann I an Crousaz, Jean Pierre de (1723.04.03)

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Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Crousaz, Jean Pierre de, 1663-1750
Ort Basel
Datum 1723.04.03
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 656, Nr.16
Fussnote Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Crousaz". Datum eigenhändig. Eigenhändige Korrekturen



File icon.gif Monsieur

Je ne suis pas assez deraisonnable pour vous demander compte de vostre silence; vous me voyez dans le meme defaut, je croy que nous avons l'un et l'autre des raisons valables, qui peuvent nous excuser: Vous avez des occupations qui vous empechent d'ecrire à vos amis aussi souvent que vous voudrez, j'ay aussi les miennes quoique sans doute moins importantes que les votres, qui ne laissent pourtant pas de me distraire, moi qui ne suis pas homme à vaquer comme vous à des affaires de differente nature, mon esprit etant tellement borné qu'à peine peut il suffire à comprendre et à demeler bien toutes les circonstances d'un seul sujet. Parmi les embarras où je me trouve plus qu'à l'ordinaire, je me derobe une heure de tems pour vous remercier du compliment tres honnete que vous m'avez fait au sujet de l'election de mon fils à la Chaire du droit à Berne;[1] Vous me dites là dessus des choses qui ont toute la force pour flatter ma vanité, car en verité si on doit prendre au pied de la lettre ce que vous m'en ecrivez, j'ay lieu d'etre fort content de la maniere que mon fils à sçu faire paroitre quelque capacité pour emporter la charge, que je croyois lui avoir eté conferée par indulgence. Vous me faites à croire qu'on n'a fait que rendre justice à son merite, je le souhaite, au moins j'espere que ce qui lui manque lui viendra un jour avec l'age, etant encor assez jeune pour avoir le tems de se perfectionner. Les souhaits que vous me faites à son egard me sont tres agreables, je vous en rends mille graces; Dieu veuille les confirmer. Mon Cadet, que vous vites dernierement passer par Lausanne venant de Vevey, est le troisieme de mes cinq Fils.[2] Si l'homme à qui il etoit confié pour le conduire ici avoit eu le tems de rester quelques jours[3] à Lausanne, j'aurois eté ravi que vous l'eussiez un peu examiné pour me dire à quoy vous l'auriez trouvé propre, il est vray qu'il temoigne aussi du penchant pour les etudes, mais File icon.gif mes deux premiers les ayant aussi embrassées, l'un le droit, l'autre la medecine, il faudroit que celui ci s'adonnat à la Theologie, à moins que son inclination ne le portat à d'autre chose.[4]

Permettez moy Monsieur que je vous parle sur le chapitre de Mr. de Rochefort, que vous me depeignez comme un scelerat. Selon ce que vous m'ecrivez de son forfait, dont on m'avoit deja fait le recit, j'avoue que vous avez grandissime raison de vous trouver offensé tres grievement et de pretendre reparation d'honneur pour M.de Votre Fille. Mr. de Rochefort depuis son retour de Lausanne, où il etoit allé pour tacher de se reconcilier avec vous me fit l'honneur d'une Visite: Je ne fus pas scrupuleux de le questionner sur cette affaire; il m'avoua franchement le fait, qu'il nomma dedestable et diabolique; il n'eut d'autre pretexte si non que ç'a eté l'effet d'un transport de fureur qui le saisit au moment qu'il apprit la nouvelle du mariage de M.de V.re Fille que ce fut dans ce moment fatal (où il avoit perdu la raison) que n'etant plus maitre de sa passion il ecrivit et lacha la lettre maudite, cause unique de son malheur; mais qu'elle ne fut pas plutot partie, que revenu de son agitation il s'en repentit incontinent; Aussi vous offrit-il, à ce qu'il ajouta, de vous donner et à M.de votre fille toute la satisfaction possible par ecrit et de bouche en presence de tels Temoins que vous eussiez souhaité: M.r V.r Gendre et M.e son Epouse se seroient, dit il, contentez d'une telle satisfaction mais que vous seul etiez inexorable[5] et que si vous eussiez voulu, l'affaire seroit finie à votre Gloire et à la reputation de toute votre famille, mais que vous pretendiez et que vous pretendez encor une reparation publique et meme devant l'Eglise ce qui le ruineroit pour jamais en le rendant infame et File icon.gif incapable d'aspirer à aucune charge d'honneur pendant toute sa vie; qu'il aimeroit donc mieux passer ses jours dans l'exil que de subir une peine fletrissante pour son honneur etc. Ce discours qu'il me tint d'un ton pleintif m'emut à la compassion je lui promis de mon propre mouvement, sans avoir eté requis, de vous en ecrire. Souffrez donc Mr. que je le fasse par cette Lettre: Votre coupable avoue et reconnoit sa faute, il marque une veritable contriction, il veut se reconcilier avec vous et avec M.e V.re Fille, il offre une satisfaction raisonnable, qui retablit et remet en son entier l'honneur et la bonne reputation de M.de V.re Fille et par consequent la votre; Que voulez vous d'avantage: pensez que vous etes Chretien et que vous priez tous les jours le Seign.r de vous pardonner vos offenses en luj promettant de pardonner aussi à ceux qui vous ont offensé; mais pensez surtout que vous étes Theologien et Ministre, que vous prechez et inculquez si fortement la reconciliation, que vous recommendez sans cesse de faire du bien à ceux qui nous font du mal, d'aimer ceux qui nous haissent, de pardonner à ceux qui nous outragent, combien plus donc à ceux qui se repentent de nous avoir fait du tort. Or ne trouvez vous pas Mons.r que vous donnez du scandale à vos Auditeurs, File icon.gif quand ils vous verront si peu disposé[6] à pratiquer ce que [vous][7] leur prechez si souvent; On vous offre de reparer d'une maniere efficace votre honneur blessé, mais vous ne voulez pas l'accepter à moins que cela ne se fasse avec la ruine totale de l'honneur de celuj qui par une pure etourderie et par une boutade de jeunesse vous a causé cette blessure; ne dira-t-on pas, que ce n'est plus la reparation d'honneur que vous cherchez, mais que vous respirez la vengeance? de grace songez y Monsieur et reflechissez meurement sur la suite et sur les impressions, que cela pourroit faire sur les esprits des hommes qui jugent des autres par leurs actions. Excusez cependant ma hardiesse de vous dire des choses que vous savez mieux que moy; c'est l'interest que je prends à ce qui vous touche, qui m'a fait parler de la sorte etant avec un zéle tres veritable, Monsieur Votre tres humble et tres obeissant Serviteur J. Bernoulli

Bâle ce 3. Avril 1723.


Fussnoten

  1. [Text folgt]
  2. [Text folgt]
  3. Im Manuskript steht "jour"
  4. [Text folgt]
  5. Der letzte Nebensatz steht am unteren Rand der Seite
  6. Im Manuskript steht "disposer"
  7. Das "vous" fehlt im Manuskript


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